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  MIKAËL HERVIAUX Journaliste, auteur et traducteur 

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CYCLISME 
Interview de Richard Marillier, quelques jours avant la Grande Boucle 2003 
 
Le Tour par Richard Marillier 
 
L’ancien directeur technique national, Richard Marillier, s’apprête à vivre le Tour de France 2003. A le vivre véritablement car le vent de passions qui enveloppe celui-ci ressemble, pour lui, à un second souffle. 
 
IL a un regard qui en dit long et dont on sait qu’il peut dérouler des kilomètres d’anecdotes. Et dans sa voix un peu éraillée, ce grain rocailleux qui griffe le verbe et lui donne du relief comme une blessure. Ce personnage à l’assurance granitique ne descend pourtant pas d’une hypothétique Armorique. Il ne s’agit pas là d’un vieux marin breton au discours parcimonieux et au visage buriné, battu par les tempêtes. C’est un gars du coin, professeur ès Tours de France qui se tient dans les starting-blocks à la seule évocation de la Grande Boucle. Intarissable Richard Marillier... ! 
 
Les épreuves du Tour 
 
Il faut dire que la source est proche car jusqu’en 1992, ce Nivernais de Vitry-Laché a été directeur-adjoint du Tour, après avoir occupé le poste de directeur technique national de 1968 à 1980. Une histoire ancienne donc ? Pas du tout ! S’il s’est laissé décrocher du peloton des suiveurs impénitents, il examinera devant sa télé avec l’acuité de l’expert, les frasques et rebondissements en tout genre que réserve le Tour de France 2003.  
Un pronostic pour cette année ? " Comme toujours, on retrouvera le vainqueur de l’épreuve dans les cinq premiers des contre-la montre et des étapes en altitude. Même si la cruelle incertitude du sport reste l’ennemie de tous les pronostics, Armstrong n’en demeure pas moins le favori, mais il devra se battre contre Armstrong. Avec les récents déboires personnels qu’il a connus, 
on reste un peu dans le flou quant à sa forme actuelle ! Seulement, pour avoir regardé la mort dans les yeux et avoir autant souffert dans sa chair, il est le seul à pouvoir encaisser de telles douleurs physiques. Car le Tour est une épreuve dans toutes ses acceptions (sportive, humaine, physique...) ". 
En l’entendant vanter ainsi les mérites du Texan, ainsi que des Espagnols ou des Italiens, on est enclin à penser qu’il ne croit guère aux chances des Français. En frôlant du bout des lèvres cette hypothèse, on sent le vent se lever : " Certes, on peut se 
poser quelques questions sur la capacité des coureurs hexagonaux à tirer leur épingle du jeu mais nous avons tout de même un joli réservoir : Moreau reste un cycliste généreux et de très grande classe, mais qui a souvent joué de malchance. Et puis, il y a les jeunes Casar et Chavanel qui ont un vrai potentiel et peuvent se positionner dans les 
quinze premiers. Enfin, il en est un qui ne faudrait pas enterrer trop vite : Richard Virenque. Aux Championnats de France, il était au-dessus de la mêlée et avait la victoire dans les jambes. Avec lui, tout est possible ! ".
 
 
Le gâchis Jean-François Bernard 
 
Entraînez-le maintenant sur le chemin à rebours des souvenirs et voilà que tout son passé vous éclabousse : les quintuples vainqueurs de la Grande Boucle sprintent sur sa langue mais c’est le Belge Eddy Merckx qui lève les bras au ciel. Le tsar des stars. 
Et comme moult anecdotes tombent en cascade de sa bouche, il convient alors de canaliser cette logorrhée pour ne pas être englouti par ces vagues de nostalgie. 
A marée basse, dans l’espace offert par un instant de silence, on tente insidieusement 
une incursion dans le monde des regrets. " Evidemment, je suis très déçu qu’il n’y ait pas de Bourguignon dans ce tour. Pour ce qui est du passé, je considère que le Nivernais Jean-François Bernard demeure un des plus grands gâchis qu’a connu le cyclisme français. Il avait le potentiel pour gagner plusieurs fois le Tour... Malheureusement, il est passé à côté d’une carrière énorme ". 
Ah, le charme de la Grande Boucle qui, à force de tournicoter dans l’Hexagone, laisse sur la route ses écheveaux de mystères ! Et sa légende naît et se nourrit de ce caractère imprévu et imprévisible. Parfois même,de rivalités ineptes aux lourdes conséquences : " Ce n’est pas sur la dernière étape que Fignon a perdu son maillot jaune pour 
neuf secondes au profit de Lemond. 
En réalité, si beaucoup plus tôt à Gap, Cyril Guimard n’avait pas demandé à son 
équipe de rouler pour rattraper un inoffensif Marc Madiot, rien ne se serait passé. Quand ensuite, Fignon a commencé à peiner dans le col de l’Izoard, Martial Gaillant, coéquipier de Madiot, n’a pas tergiversé à l’heure de collaborer avec Lemond dans une échappée. Voilà comment un grand coureur cycliste comme Guimard peut aussi devenir un directeur sportif machiavélique, en plombant une victoire qui tendait pourtant les bras à son leader, pour un sombre règlement de compte ". Comme quoi, le Tour de France n’est pas épargné lui non plus par le bruissement d’ailes du papillon. 
Bref, Richard Marillier pourrait discourir des journées entières sur le vélo, mais là encore, 
il faut bien boucler la boucle. Alors, il ronge son frein et attend avec impatience le 10 juillet que le peloton passe en revue d e v a n t sa po r t e . . . o u presque ! (*). Sachant par avance qu’une fois de plus, " cette épreuve draînera drames, effondrements et passions débridées". Décidemment, cet amour immodéré a parfois des accents rimbaldiens avec ses " vertiges, écroulements, déroutes et pitié. " 
 
(*) Il vient de publier Plus d’un Tour dans mon sac, aux éditions de l’Armançon.
 
 

(c) mikaël herviaux - Créé à l'aide de Populus.
Modifié en dernier lieu le 22.04.2005
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